Début juillet 2020, Xavier Thévenard s’est attaqué au record du GR20 : 180 km et 13.000 mètres de dénivelé positif, à boucler en moins de 31 heures. 31h06 précisément, c’est le record détenu par François D’Haene, l’ultra traileur vigneron qui a ensuite été abaissé par Lambert Santelli ! Qui est Xavier Thévard et arrivera t-il à baisser le record de la traversée de la Corse par le GR20 ? On va vous dévoiler tout ça ici, avec un retour sur son record, ses temps de passage et malheureusement [spoiler alerte] son abandon !
Lorsqu’on évoque les « grands » noms de l’ultra-trail, Xavier Thévenard revient souvent dans la conversation. Triple vainqueur de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc, il jouit d’une solide réputation de coureur endurant, habitué aux courses de très longue distance. Pourtant, même les meilleurs athlètes peuvent se heurter à des défis de taille et le GR20 corse figure précisément dans cette catégorie.
En juillet 2020, Xavier Thévenard s’est lancé à l’assaut de ce sentier mythique avec un objectif clair : tenter de battre le record établi par François D’Haene en 2016 (31h06). L’aventure a beau ne pas s’être soldée par un nouveau temps de référence, elle a laissé une empreinte forte, tant pour le coureur que pour le public.
Revivez l’aventure de Xavier en vidéo
J’ai suivi son périple presque heure par heure, et j’avoue que j’étais partagé : d’un côté, je rêvais de voir ce champion repousser les limites, battre ce record et s’inscrire à jamais dans l’histoire de la traversée corse. De l’autre, je savais combien le GR20 pouvait être impitoyable, avec ses terrains accidentés et ses conditions météo parfois extrêmes. À cela s’ajoute un parcours d’environ 180 kilomètres et jusqu’à 14 000 mètres de dénivelé positif selon les relevés, ce qui en fait un véritable défi, même pour un athlète habitué aux ultra-trails.
Un départ prometteur au petit matin
Xavier Thévenard s’est élancé de Calenzana, au nord-ouest de la Corse, dans la nuit du 6 juillet 2020, bien avant que le soleil ne fasse son apparition. Entouré d’une trentaine de « pacers » – pour la plupart des coureurs locaux – et soutenu par des proches, il est parti sur un rythme ambitieux. Son intention : rester en avance sur les temps de passage de François D’Haene.
Pendant un bon moment, les choses se sont déroulées comme prévu, malgré la technicité du terrain. Les premiers segments laissaient même entrevoir un exploit, tant le Jurassien semblait énergique et concentré.
La chaleur corse, adversaire redoutable
Ce qui a fini par faire basculer la situation, d’après les différents témoignages recueillis, c’est l’arrivée d’une chaleur écrasante au cœur de l’après-midi. Dans ces conditions, maintenir une allure soutenue relève parfois de la gageure. D’autant plus que lorsqu’on s’aventure sur des crêtes rocailleuses, la fatigue s’installe à la fois dans les jambes et dans la tête.
Thévenard a commencé à ralentir, jusqu’à perdre progressivement l’avance qu’il avait acquise sur le record. Les longues heures de course nocturne, sous des températures plus clémentes, lui ont certes permis de reprendre un peu de souffle, mais le mal était fait : les minutes se sont envolées.
L’importance des soutiens locaux
Une partie touchante de cette aventure réside dans la mobilisation des coureurs insulaires. Guillaume Peretti, ancien détenteur du record (32h), faisait par exemple partie de ceux qui l’ont épaulé sur plusieurs kilomètres.
D’autres coureurs corses se sont relayés pour lui apporter eau, réconfort et motivation. En suivant l’affaire à distance, j’ai été impressionné par cette solidarité typique de la communauté trail. Là où certains sports ne laissent pas de place à la collaboration, le trail conserve cet esprit de camaraderie qui fait, selon moi, tout son charme.
Un troisième meilleur temps
Finalement, Xavier Thévenard est arrivé à Conca en 32h32, soit presque une heure et demie après la marque référence de François D’Haene. Ironie du sort, le Jurassien se positionne du coup au troisième rang des meilleurs chronos sur ce GR20, juste derrière Peretti (32h) et D’Haene (31h06).
Il devance malgré tout d’autres grands noms, comme Kilian Jornet, qui avait réalisé un temps de 32h54 en 2009. Difficile, donc, de ne pas applaudir la performance, même si l’objectif initial n’a pas été atteint.
À quoi tient un record ?
Cette question me revient souvent à l’esprit : où se situe la frontière entre la réussite et l’échec, surtout sur des défis aussi épuisants ? L’expérience de Xavier Thévenard montre qu’une tentative de record est soumise à d’innombrables variables.
La forme du jour, la gestion de l’alimentation, la qualité du sommeil, la répartition des efforts et même des facteurs moins prévisibles comme la météo ou la moindre blessure peuvent tout faire basculer. Dans le cas du GR20, un passage à vide, des coups de chaleur ou des ampoules aux pieds peuvent ralentir la progression de façon irrémédiable.
Un mental d’acier
Bien sûr, un coureur qui s’attaque à ce genre de défi possède un mental hors norme. Plusieurs témoins ont d’ailleurs parlé de Xavier comme d’un athlète doté d’une grande capacité de résilience et d’une faculté étonnante à « oublier » la douleur pour continuer à avancer. N’empêche qu’après plus de 30 heures d’effort, même les plus robustes finissent par se demander ce qui les motive à continuer.
Le Jurassien, épuisé à l’arrivée, a mentionné la souffrance intense ressentie dans les derniers kilomètres. Ce fut, selon lui, une sorte de « chemin de croix », un épisode qu’il n’est pas pressé de revivre de sitôt.
Le sens de l’aventure
Qu’il s’agisse de chercher un chrono ou de se prouver quelque chose, ce type de projet dépasse souvent la simple performance. Tout au long de ce périple, Xavier Thévenard a insisté sur l’importance de l’échange humain, du partage et de la découverte du territoire. Alors oui, le record de 31h06 n’a pas vacillé, mais l’ultra-traileur repart avec un sentiment de profonde gratitude envers toutes les personnes qui l’ont accompagné et soutenu, ainsi qu’une histoire à raconter pour le reste de sa vie.
Un aboutissement, mais pas un final
Comme beaucoup, je me demande s’il retentera un jour l’aventure. Lui-même a confié qu’il ne s’imaginait pas revenir s’infliger une telle épreuve sur ce sentier infernal. Pourtant, les coureurs de haut niveau sont parfois prompts à changer d’avis quand la passion l’emporte sur la raison. Quelle que soit sa décision future, Xavier Thévenard pourra se féliciter d’avoir rejoint le cercle très fermé des athlètes qui ont terminé le GR20 en si peu de temps. À mes yeux, cette performance incarne tout ce qui fait la beauté et la dureté de l’ultra-trail : la quête d’un rêve, la rencontre avec ses propres limites et la force d’un collectif qui n’hésite pas à se mobiliser pour porter un coureur au sommet de son art.
En fin de compte, peut-être que le vrai « record » se cache ailleurs : dans la capacité d’un sportif à faire d’un échec relatif une expérience incroyablement riche, à la fois humaine et sportive. De quoi rappeler que, si les chronos et les classements sont l’apanage de la compétition, la mémoire d’une aventure aussi intense, elle, reste gravée pour longtemps.
Ses prévisions initiales et temps de passage du GR20
Malheureusement, nous n’avons pas pu récupérer la trace GPX pour analyser les temps de passage, mais initialement il avait prévu
- départ 4h00 calenzana
- Col de Vergio à 13h
- Vizzavone à 20h25
- 7h05 du matin à Bavella
- 10h à Conca, soit 30h au total
Départ le 6 juillet à 4h00 : suivi live
On a retrouvé les temps de passage du recordman actuel (François d’Haene), cela permettra de voir si Xavier tient le record à portée de main
4h00 : départ de Calenzana avec une météo clémente. Comme pour tous les records, c’est dans le sens Nord > Sud
5h54 : il passe à Ortu di, après 11km et 1400m de D+. Quelques minutes d’avance sur François qui passait en 1h58 à ce point.
7h40 : il arrive dans la zone du second refuge, à savoir Carrozzu. François passait ici en 3h28 alors que Xavier y est en 3h40.
A bocca di stagnu, Trail Endurance Mag annonce le passage en 5h, la vidéo du moment (François d’Haene passait en 4h23)
Le tracé du record passe par le cirque de la solitude, ce n’est plus le tracé officiel du GR20 même si celui ci est officiellement « réouvert »
François était passé en 4h54 à l’intersection du site sensible d’Altore puis 5h52 au refuge de Tighettu, en contrebas du cirque. Pour xavier, 5h20 à l’intersection puis à voir pour le second point. A mon sens, il accuserait déjà un retard de 25 minutes sur le record actuel mais cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas le faire, Xavier à son topo et ses propres temps de passage (d’après Trail endurance mag, il est dans ses temps)
En fin de journée comme prévu, Xavier arrive à Vizzavone et s’engage sur la partie « plus roulante » du GR20 : le sud.
Au levé du soleil, Xavier est toujours sur le record, il est à 2 ou 3 minutes près dans les temps de François : ça va se jouer à « pas grand chose »
SUIVI LIVE DE XAVIER
Qui est Xavier Thévenard ?
Une rencontre, vous allez en faire une inédite et vraiment express si vous randonnez sur le sentier en ce début juillet 2020 : Xavier Thévenard risque d’emprunter la même trace que vous !
Xavier Thévenard, c’est un habitué des podiums en ultra trail : dans la même catégorie que François D’Haene, Girondel ou encore Jornet, le gaillard a déjà inscrit son nom à plusieurs courses mythiques : vainqueur de l’UTMB, Templiers ou encore Ultra trail du Mt Fuji. Sa bio complète ici
Il a les ressources d’aller taquiner le chrono de François d’Haene et il saura s’appuyer sur une logistique de taille : pas moins de 30 personnes pour l’accompagner en relais dont des coureurs locaux de renom : Guillaume Peretti le coureur de Corté qui connait le sentier comme sa poche et qui a déjà inscrit son nom au palmares du GR20.
Le programme : départ selon la météo entre le 6 et 10 juillet, vers 4h du matin pour faire tout le GR20 Nord la première journée (la partie la plus technique de jour)
Cette page permettra de suivre son avancé, rendez-vous. Bon courage pour les préparatifs et bonne préparation à tous les randonneurs qui partent sur le GR20 en juillet !!